L'État s'immisce dans le mariage entre Orange et Bouygues Telecom
Alors que les négociations s'annoncent déjà difficiles, l'État vient de poser des conditions qui risquent d'entraver la fusion entre Orange et Bouygues Telecom.
Publié le 30-03-2016 par Laurent Baquista
Revirement de situation
En principe, Orange et Bouygues Telecom devraient réunir chacun à 17 heures ce mercredi 30 mars leurs conseils d'administration respectifs, afin d'annoncer la réussite ou l'échec des négociations sur la fusion entre les deux opérateurs téléphoniques. Ces deux conseils se dérouleront donc à la veille de la date buttoir qu'avait fixé Martin Bouygues pour achever le processus de négociations.
Ce matin, l'issue ne semblait nullement douteuse : on allait vers la fusion. Free récupérait les 550 boutiques Bouygues Telecom, etc. Bref, tout semblait aller pour le mieux, comme si les nombreuses « réunions de la dernière chance », qui se sont multipliées ces derniers jours, avaient fini par aboutir. Seuls subsistaient quelques sujets, épineux certes, mais qui auraient sans doute pu se régler, quitte à accorder aux négociateurs quelques jours supplémentaires.
Mais c'était compter sans l'actionnaire principal d'Orange, l'État français. Il semble en effet que, dans la matinée, Bercy serait venu s'immiscer dans les négociations, notamment pour contester les sommes retenues pour la valorisation des actifs d'Orange et de Bouygues Telecom, tant ceux entrant dans la fusion que ceux qui devraient être cédés à des tiers, comme Free ou Numericable-SFR. Pourtant, selon des sources proches du dossier, le montant du différend ne porterait en tout que sur 180 millions d'euros, pour un total de 10 milliards d'euros.
L'État crispe les négociations
Par ailleurs, il semble que l'entrée de Bouygues au capital d'Orange pose aussi problème. Martin Bouygues souhaitait obtenir 15% du capital de l'opérateur historique, à la faveur d'une augmentation de capital réservée de 10%, et d'acquisition des 5% restants sur les marchés. Pour éviter une entrée trop remarquable du groupe de BTP chez Orange, Bercy cherche donc à survaloriser les actifs d'Orange, et à minimiser ceux de Bouygues Telecom, afin de faire mathématiquement baisser le poids du champion du BTP dans le capital du leader des télécommunications. Il s'agit bien entendu pour l'État d'être certain de garder la main et le pouvoir, en conservant son statut d'actionnaire de référence et ses 23% du capital.
Autre sujet épineux, celui du coût social de la fusion. Selon le quotidien Le Monde, l'État souhaite que le surcoût lié à l'intégration des salariés de Bouygues Telecom soit assumé par le groupe de BTP, ce qui augmente la facture de plusieurs centaines de millions d'euros.
Dans ces conditions, on peut légitimement se demander si la fusion a une chance d'aboutir, d'autant qu'il peut être tentant et facile d'en rejeter la responsabilité sur un gouvernement qui semble jouer les pyromanes dans un dossier déjà explosif.
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