La société numérique est minée par la défiance

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OPINION. À l'ère de l'infobésité, l'incorruptibilité des médias et de la science est remise en cause. Mais pour relever les défis à venir, il faut savoir distinguer les paroles, les expertises et les émetteurs. Par Olivier Babeau, président de l'Institut Sapiens, professeur à l'Université de Bordeaux.

Publié le 18-07-2019 par Olivier Babeau

Souvenons-nous : à la fin des années 1990, Internet avait été décrit comme l'épiphanie de la transparence économique, du débat démocratique et de l'accès à la culture pour tous. Les nouveaux outils numériques étaient annoncés comme autant de remèdes à nos maux endémiques : asymétries informationnelles, stratifications sociales et rentes en tous genres. C'est peu de dire que les espoirs ont été déçus. On attendait Grouchy, et ce fut Blücher : jamais le monde n'a semblé aussi cloisonné, illisible et incertain. La société numérique est minée par la défiance.

Les médias sont les premiers touchés. La facilité d'accès à l'information a eu une conséquence imprévue : ce qu'Alvin Toffler a nommé l'infobésité, un néologisme qui décrit à merveille la surcharge informationnelle à laquelle nous sommes confrontés. Chaque jour, nous passons plus de 8 heures sur les écrans et nous déroulons l'équivalent de 90 mètres sur notre smartphone. On estime qu'au cours d'une vie, au rythme actuel, ce sont six années qui seront passées à surfer sur les réseaux sociaux. Nous recevons des quantités gigantesques de textes et vidéos provenant de sources plus ou moins fiables. Alors que faire la part des choses exige un esprit averti et attentif, nous survolons ces contenus de plus en plus vite : les études montrent qu'on ne lit en moyenne que 18 % d'un texte proposé en ligne.

La cacophonie des opinions

Comme l'a écrit Nicholas Carr, Internet change la façon dont notre cerveau fonctionne, réduisant notammen

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