Départ annoncé

Comme nous l'annoncions déjà hier matin, la réunion du conseil d'administration d'Airbus, qui s'est déroulée jeudi après-midi, a été le théâtre de bouleversements profonds dans la gouvernance de l'avionneur toulousain. En pleine crise et sur fond d'affaires et d'enquêtes judiciaires pour corruption, le constructeur aéronautique a dû tirer des leçons de cette crise grave et sérieuse, et prendre enfin en compte les dissensions qui existent depuis toujours entre Fabrice Brégier, le numéro 2 d'Airbus, et son président Tom Enders.

Ce dernier n'a toutefois pas été épargné, puisqu'il devrait aller jusqu'à la fin de son mandat, en mai 2019, mais ne sera pas renouvelé. Ce que redoutaient hier les représentants syndicaux a donc eu partiellement lieu : voici Airbus déstabilisé par un renouvellement soudain de sa gouvernance, et surtout le départ d'un homme qui avait très largement contribué à la restructuration et à la redynamisation du constructeur aéronautique européen, à la suite de la crise de l'A380. Fabrice Brégier, contraint au départ et n'ayant pu trouver du côté du gouvernement ou de l'Élysée un quelconque soutien, sera remplacé par l'actuel patron d'Airbus Helicopters, Guillaume Faury.

Départ injuste

Le départ de Fabrice Brégier peut bien évidemment apparaître injuste, à tel point que l'on peut être amené à se dire que celui de Tom Enders aurait été bien plus logique et mérité. En effet, si l'on ne regarde que du côté des affaires judiciaires en cours, force est de reconnaître que Fabrice Brégier, lui, n'a jamais été concerné par les enquêtes britanniques sur les irrégularités de ventes. Ces dernières avaient en effet été gérées par Marwan Lahoud, qui rapportait directement et exclusivement à Tom Enders.

D'autre part, Fabrice Brégier oeuvre depuis dix ans au sein d'Airbus et a été le principal artisan de ses récents succès. On lui doit notamment l'entrée d'Airbus sur le marché japonais, et surtout le lancement de l'A350 et de la famille A320neo, les deux meilleures ventes de l'avionneur européen actuellement, des avions capables de séduire même la compagnie américaine Delta Airlines, qui vient de passer commande de 100 A320neo et de poser une option sur 100 appareils supplémentaires.

Il aurait donc été plus logique, et peut-être souhaitable pour Airbus, que Fabrice Brégier succède à Tom Enders. Mais dans cette incessante rivalité qui oppose les deux hommes, Brégier n'a pas eu le dernier mot.