L'ANDRA, EDF, le CEA et Areva divergent sur le coût de Cigéo

Les estimations du coût de Cigéo, le futur centre de stockage des déchets nucléaires en couches géologiques profondes, diffèrent fortement entre l'ANDRA et les trois producteurs de déchets chargés de sa construction. Des écarts de 30% existent, faisant varier le coût du projet entre 20 et 30 milliards d'euros.

Publié le 12-01-2016 par Guilhem Baier

Nombreuses divergences

 

La facture de Cigéo sera lourde, mais il est difficile de dire à quel point. En effet, entre l'Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs, et les trois producteurs de déchets que sont Areva, le CEA et EDF, les estimations sont bien différentes. Selon les hypothèses choisies par les uns ou par les autres sur la construction du futur centre de stockage des déchets nucléaires en couches géologiques profondes prévu à Bure, dans la Meuse, le coût estimé diffère de 30%. Selon une note de synthèse de l'ANDRA, elles « peuvent conduire à des différentiels de l'ordre de 30% à la fin de la phase d'esquisse ». Ce qui, au bout du compte, aboutit à « un écart entre un chiffrage d'environ 20 milliards d'euros et un autre d'environ 30 milliards d'euros ».

Ce n'est pas la première fois que le chiffrage du projet Cigéo pose problème. En 2005, lors d'une première estimation à la suite du grand débat public sur le projet, l'ANDRA avait évalué son coût entre 13,5 et 16,5 milliards d'euros. En 2009, une estimation plus pointue, toujours menée par l'ANDRA, avait relevé la facture à 36 milliards d'euros, montant immédiatement contesté par les trois producteurs de déchets. Dans un dernier rapport transmis fin 2014 au Ministère de l'Ecologie, le coût estimé par l'ANDRA s'élèverait désormais à 34,4 milliards d'euros, ventilés ainsi : 19,8 milliards pour la construction, 8,8 milliards pour l'exploitation durant plus de cent ans, 4,1 milliards d'impôts et taxes, et 1,7 milliard de dépenses courantes diverses. C'est précisément ce chiffre que contestent les producteurs de déchets, qui doivent participer au financement du projet Cigéo.

 

Problèmes d'évaluation

 

A la décharge de l'ANDRA, qui fait valoir cet argument dans sa note de synthèse, le chiffrage d'un tel projet est difficile : « Il est à noter que l'évaluation de ces coûts est un exercice particulièrement délicat puisqu'il nécessite de faire des hypothèses sur le coût du travail, de la fiscalité, des matériaux ou de l'énergie pendant plus de 100 ans ». Mais pour le géant du combustible, l'exploitant du parc nucléaire, et le centre de recherche sur l'atome, l'ANDRA n'a pas tenu compte des optimisations possibles, et méconnaît les économies éventuelles que seul le « retour d'expérience industriel » peut faire apparaître.

Or, du côté de l'Autorité de sûreté nucléaire, qui va devoir statuer sur le projet Cigéo, les hypothèses de l'ANDRA seraient considérées comme trop optimistes. Ce qui fait en particulier tiquer le gendarme du nucléaire, c'est que l'ANDRA n'ait pas envisagé que le volume de déchets à stocker puisse être supérieur à ce qu'elle a prévu, et donc aux capacités d'accueil de Cigéo. Autrement dit, si l'on suit l'ASN, Cigéo devrait coûter encore plus cher que ce que prévoit l'ANDRA, et que les bailleurs contestent.

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